Document commenté dans « Bouddhisme et Kum Nyé« , Cours 5: Le karma/ l’éthique
En fin de compte, il n’y a pas moyen d’échapper à être responsables de nous-mêmes.
Nous désirons tous être heureux, vivre une pleine qui en vaut la peine. […] Nous pouvons peut-être trouver un soulagement temporaire en les diverses formes de satisfaction de l’ego, mais finalement nous nous rendons compte que de tels plaisirs sont fugitifs. Si, au lieu de cela, nous apprenons à être responsables, et à vivre en harmonie, nous sentirons un sens profond de la liberté intérieure qui donnera un but à notre vie et nous soutiendra même dans les situations les plus difficiles. […]
La vie est toujours en mouvement, elle change constamment – un moment passe, qui n’est jamais le même que le précédent. À chaque instant notre corps subit des changements physiologiques et psychologiques dont nous ne sommes pas conscients. Quand nous sommes conscients de ces changements, nous pouvons plus facilement apprécier la vie et communiquer avec les autres. Cependant, quand nous sommes inconscients de ce qui arrive dans notre vie, nous pouvons nous rendre compte soudain que nous ne vivons qu’à moitié et que nous avons fait peu de progrès pour nous libérer des obstacles ou pour développer nos qualités positives. Puisque la vie est continuellement en mouvement – et va plus vite qu’un fleuve – nous avons besoin de bien utiliser chaque moment.
Il importe alors que nous soyons conscients de chaque moment, de prendre garde de penser à ce que nous faisons et non pas d’agir avec insouciance. La spontanéité qui vient de la certitude et de la confiance en soi est une qualité très positive ; mais très souvent, quand nous réagissons sans penser, nous sommes comme le coton d’une capsule qui s’envole au gré du vent. L’action spontanée est imprévisible et peut ainsi mener à la confusion et à la perplexité ; nous pouvons être portés aux extrêmes par notre mental troublé. Ainsi nous devons contrôler notre impulsivité et dépendre au contraire de notre force intérieure et de notre conviction. La plupart d’entre nous préfèrent suivre tout ce qui nous fascine sur le moment sans prendre garde aux conséquences.
Une fois, il y avait un roi singe qui regardait le bas d’un canyon ; il vit la lune brillante qui se reflétait sur l’eau. « Oh quel beau joyau ! Il faut que je l’aie ! » pensa-t-il. Quand il raconta cela aux autres singes, ils dirent tous ce serait très difficile ; mais le roi singe dit : « J’ai une idée : un singe s’accrochera à une branche et les autres formeront une ligne, chacun se tenant solidement au singe qui le précède. Ainsi nous pourrons descendre notre chaîne de singes jusqu’à l’eau et le dernier pourra atteindre le joyau. Alors cinq cent singes se suspendirent un par un en direction de l’eau, mais le poids de tous les singes étant trop important pour celui qui se tenait à l’arbre et tous les singes tombèrent dans l’eau et se noyèrent.
Notre mental est souvent comme le singe : quand nous ne considérons pas nos actions au préalable, nous sommes incapables de voir clairement les conséquences, et nos fantasmes de joyau, nos rêves et nos emprises égoïstes nous causeront des ennuis. Quand nos actions sont accomplies aveuglément, sans direction pratique ou logique, nous pouvons être pris au piège dans des situations encore plus inextricables qu’avant.
Aussi prenez garde à votre corps et à vos sens. Sortez du brouillard des rêves du futur ou du passé. Abandonner le romantisme émotionnel et soyez simplement conscient de ce qui se passe dans votre mental et vos sentiments. Une fois que vous avez trouvé votre harmonie, vous pouvez la maintenir, quoi qu’il arrive dans votre vie.
Le comportement de notre vie quotidienne peut être notre éducation. De temps en temps analysez vos pensées et examinez les événements de votre vie, et soyez conscient à chaque instant. Si vous faites cela régulièrement chaque jour, vous développerez une saine qualité d’authenticité ; votre vie deviendra moins chaotique et confuse et vous ne trouverez pas d’intérêt à rechercher la satisfaction hors de vous-même. Faire face à chaque situation avec conscience est l’une des meilleures façons d’être responsable.
Tarthang Tulku, « La quête de l’harmonie : Être responsable », Trédaniel, 2003, p.43-48.